Etienne Gros, fumées noires et corps de porcelaine
Étienne Gros peint avec la légèreté d’un souffle. Sur la feuille blanche, de moelleuses volutes d’ébène évoquent des corps nus, parfois enlacés. Aucun trait acéré, aucune mine ne sont venus marquer le papier, aucune gomme n’a râpé sa surface. Ces œuvres, exposées à la Galerie Sparts à Paris jusqu’au 27 avril, sont nées d’une technique singulière. Tubes de peinture, pinceaux et crayons sont restés dans les tiroirs de l’artiste. Forgeron d’un genre particulier, charmeur de feu, Étienne Gros se sert de la flamme d’une bougie ou d’une lampe à pétrole pour dessiner avec les volutes de fumée. Le dépôt de carbone donne corps aux rêves de l’artiste. Ce dernier se laisse émerveiller par l’aléatoire que la flamme lui propose… La magie opère ou fait long feu !
Cimaises-le blog : Comment vous est venue l’idée de peindre avec la fumée ?
Étienne Gros : J’ai commencé à travailler avec le noir de carbone quand j’étais étudiant aux Beaux-Arts de Paris entre 1983 et 1986, mais en noircissant complètement la feuille. Je retirais le noir dans le principe de la carte à gratter, mais au pinceau ou à la gomme, ensuite j’ai expérimenté d’autres techniques. J’y suis revenu par hasard en jouant avec la flamme d’une grosse bougie qui traînait dans mon atelier, j’ai découvert de nouvelles possibilités que je n’avais pas élaboré, en dessinant réellement avec la flamme.
Quels sont les enjeux de cette technique particulière ?
La véritable difficulté est d’appréhender ce que la flamme va déposer sur le papier, avec toute sa fragilité, l’agitation procurée par le petit courant d’air, la bonne distance entre le papier et la flamme. J’ai une gamme importante de lampes à pétrole et chacune a sa particularité par la taille et la forme de sa mèche. Il y en a des plates, des rondes de formats différents, à l’identique de la gamme des brosses et des pinceaux du peintre. Plus le format du dessin est grand et plus la mèche de lampe doit être grosse et large, pour dégager le plus de noir de carbone.
Il y a énormément de gaspillage, car la flamme me propose souvent des formes et des volutes qui ne m’évoquent rien et puis soudain, comme par magie, un dessin s’esquisse, une forme apparaît, une silhouette, un début d’un dos, un personnage et la difficulté est de préciser ce dessin sans l’abimer par un caprice de la flamme. Dessiner avec un outil si fragile est un enjeu de taille, mais c’est cette difficulté qui m’intéresse et crée parfois de belles surprises.
Qu’apporte cette technique à votre univers créatif ? Abordez-vous le corps d’une manière différente ?
Cette technique m’aide à travailler avec une grande maîtrise, un calme presque méditatif et nécessite de cultiver une acuité visuelle. J’aborde le corps de manière différente dans le sens ou nous sommes deux à travailler, la flamme et moi. Elle m’offre des dessins que je n’aurais jamais pu inventer seul.
Ce travail « nourrit-il » vos peintures à l’acrylique ? Si oui, de quelle manière ?
L’axe principal de mon travail est le corps et les fumées m’apprennent à l’aborder d’une autre manière, mais le trait noir et le dessin de mes tableaux sont très proches de ce que je peux obtenir avec les fumées, j’ai déjà expérimenté un mixte des deux et cela se conjugue très bien.
In brief :
The French artist, Etienne Gros, paints with an original medium : smoke of candles or oil lamps. The deposits of carbon draw some vaporous and sensual human bodies on the paper. Amazing and magic !
Exhibition at the Sparts art gallery in Paris, until April 27.
merci de ce commentaire sympathique !
Etonnant et très beau…bravo à l’artiste