Les nuits de Katia Bourdarel

Katia Bourdarel, « Psyché et Eros », huile sur toile, 195 x 130 cm. Courtesy galerie Eva Hober

Après avoir longtemps exploré l’univers des contes de fées, et plus particulièrement ceux de Perrault et des frères Grimm, Katia Bourdarel nous invite à partager les nuits sensuelles de Psyché. Elle présente ce travail à la galerie Eva Hober à Paris jusqu’au 17 novembre.

« Je me suis penchée sur ce mythe qui commence par « Il y avait une fois » et qui raconte les amours de Psyché, la plus belle des mortelles, et d’Éros, Dieu de l’Amour, explique l’artiste*. Ce qui m’amusait là, c’était la question de la métamorphose ; c’est-à-dire le passage d’un état à un autre. Ici, la métamorphose est une apothéose, puisque la mortelle deviendra déesse. Mais que perd-elle et que gagne-t-elle ? La question qui se pose concerne les enjeux d’une telle transformation. »

Ce mythe est en effet très riche du point de vue symbolique. Il a inspiré de nombreux artistes au travers des siècles, comme Fragonard, Bouguereau, GérardCanova… Dans la mythologie grecque, Psyché ne doit pas chercher à connaître le visage du mystérieux amant qui la visite toutes les nuits et qui n’est autre qu’Éros. Mais poussée par la jalousie de ses sœurs, elle rompt sa promesse et perd l’être aimé, qui s’enfuit. Elle doit alors affronter une série d’épreuves pour le reconquérir. La dernière la plongera dans un sommeil proche de la mort. Le récit évoque ainsi l’aspiration à la beauté de l’âme humaine, l’éveil de la conscience, la quête de l’amour absolu…

Katia Bourdarel, « Les eaux dormantes 2 », huile sur toile, 60 x 60 cm. Courtesy galerie Eva Hober

Katia Bourdarel interroge le mythe en déclinant différentes techniques : aquarelle sur papier, peinture à l’huile, sculpture en bois. Dans la première salle de la galerie, deux grandes toiles peintes sur fond blanc représentent les amants enlacés. Elles suggèrent la plénitude de l’amour, la délicatesse des sentiments. Elles s’opposent à une série de peintures sur fond noir, intitulée Les eaux dormantes présentée dans la deuxième salle. On y voit le visage lumineux de l’héroïne, émergeant d’une eau sombre et lourde. Est-elle happée par le poids du souvenir, le vide de la mort, ou au contraire renaît-elle à la vie ?

Katia Bourdarel, « les larmes lourdes », bois brûlé, fil de coton, et miroir noir, 250 x 200 x 200 cm. Courtesy Galerie Eva Hober.

Katia Bourdarel ne vise pas l’illustration, ni l’évocation savante. « Ce qui demeure le plus important, ce sont les sentiments vécus ou sublimés et par conséquent les errances poétiques davantage que les connaissances. »* Les  sculptures en bois sont aussi très belles. Leur facture, plus rustique, contraste avec les toiles à la précision quasi photographique. Comme si elle avait voulu accomplir un sacrifice rituel, l’artiste a brûlé ces pièces qui ont pris une teinte noire profonde. « Si dans les peintures la peau est lisse, dans les sculptures elle est attaquée, brûlée jusqu’aux chairs. Un peu comme si l’on avait en peinture une représentation de l’endroit de la peau, et en volume, une représentation de l’envers, nous dévoilant sa matière, sa chair douloureuse et exaltée. »*

L’exposition Les nuits de Psyché se tient jusqu’au 17 novembre 2012 à la Galerie Eva Hober, 35-37 rue Chapon, 75003 Paris. La galerie est ouverte du mardi au samedi de 11 à 19 heures.

* Les citations sont extraites d’un entretien de l’artiste avec Léa Bismuth publié dans le beau catalogue monographique « Les larmes lourdes » édité à l’occasion par la galerie.

2 réponses

  1. martina dit :

    merci Valérie pour l’info. Beau sujet!